Définitions

L'endométriose

Qu'est-ce que l'endométriose ?

L’endométriose est une maladie chronique inflam­matoire qui concerne 1 à 2 personnes sur dix ayant un utérus, pouvant provoquer de violentes douleurs, une fatigue chronique, le dys­fonction­nement et/ou la perte de l’usage de certains membres et organes, ainsi que l’infertilité. C’est une pathologie complexe à l’origine d’une longue errance diagnostique. Il n’existe aujourd’hui aucun traitement à cette maladie. Certains cas rares d’endo­métriose peuvent être asymptomatiques.

L’endométriose se caractérise par la présence à l’extérieur de l’utérus de tissu semblable à l’endomètre (l’endomètre est le tissu qui recouvre la paroi interne de l’utérus. Au début de chaque cycle menstruel et sous l’effet des hormones, l’endomètre s’épaissit en vue d’accueillir une potentielle grossesse. Si aucun ovule n’est fécondé en fin de cycle, l’endomètre, qui est un tissu vascularisé, se désagrège et saigne : ce sont les règles). Ce tissu, implanté sur d’autres organes, suit le rythme hormonal : il s’épaissit, se vascularise puis se désagrège et saigne en dehors de l’utérus, c’est l’endométriose. Il est important de préciser que lorsqu’on parle d’endométriose, il s’agit d’un tissu semblable, mais qui n’est pas de l’endomètre à proprement parler.

Ce tissu peut coloniser l’ensemble des organes génitaux : vagin, utérus, trompes, ovaires, ligaments utérins, péritoine (membrane tapissant la cavité abdominale et les organes qui s’y trouvent), l’espace séparant le vagin du rectum, etc. Il peut également s’étendre à des organes non génitaux : vessie, appendice, côlon, intestin grêle, paroi abdominale, diaphragme (muscle qui sépare le thorax de l’abdomen), plèvre (membrane qui recouvre les poumons), etc.
Tous ces espaces ou organes colonisés ne sont pas, à l’inverse de l’utérus, anatomiquement conçus pour évacuer les saignements. Les cellules, n’ayant pas la possibilité de s’évacuer, se collent aux organes environnants et s’y développent. Peuvent s’ensuivre lésions, nodules, kystes, réactions inflammatoires, formation de cicatrices fibreuses et d’adhérences pouvant accoler les organes avoisinants et provoquer leur dysfonctionnement ou la perte de leur fonction.

Il est difficile de parler de l’endométriose de façon linéaire tant ses formes, symptômes et localisations potentielles sont multiples. On dit d’ailleurs souvent qu’il y a autant d’endométrioses que de personnes atteintes.
L’usage veut aujourd’hui que l’on parle DES endométrioses.

On peut classer les endométrioses en fonction de la localisation des lésions : on parle alors d’endométrioses pelviennes, localisées dans le petit bassin et d'endométrioses extra-pelviennes, en dehors du petit bassin.

Les atteintes pelviennes vont concerner principalement : le bas de l’appareil urinaire (la vessie, la portion basse des uretères (canaux reliant les reins et la vessie), les reins, l’appareil génital (les ovaires, le muscle interne de l’utérus : on parle alors d’adénomyose, les ligaments utéro-sacrés), une partie de l’appareil digestif (rectum, canal anal et parfois la boucle sigmoïdienne, ainsi que l’appendice), la cloison recto-vaginale, le cul-de-sac de Douglas.

S’agissant des atteintes extra-pelviennes, elles peuvent toucher les intestins, le diaphragme, le thorax, la paroi abdominale (atteintes pariétales). Cette liste est non exhaustive.

L’endométriose est loin d’être une « simple » maladie gynécologique. C’est une maladie systémique qui peut se développer partout dans le corps et peut avoir des conséquences sur de multiples aspects de la vie de la personne atteinte.
Malgré ce que l’on peut entendre, l’endométriose ce n’est pas « des douleurs de règles »... ou du moins pas seulement !

Les symptômes de l'endométriose

En rapport avec le système gynécologique :

  • Dysménorrhées : les fameuses douleurs pendant les règles ;
  • Dyspareunies : douleurs pendant les rapports sexuels qui peuvent être diverses (superficielles à profondes) ;
  • Douleurs pelviennes : douleurs aux ovaires ou contractions utérines situées dans la zone pelvienne ;
  • Infertilité : insuffisance ovarienne, trompes atrophiées, problèmes à la nidation.

En rapport avec le système digestif :

  • Dyschésie et autres troubles intestinaux : douleurs pour évacuer les selles, constipation, syndrome de sub-occlusion, diarrhées, ballonnements, etc. ;
  • Dysurie, pollakiurie, hypersensibilité de la vessie : difficultés à uriner avec efforts de poussée/troubles de la miction avec augmentation de la fréquence du besoin d’uriner ;
  • Incontinence anale ou vésicale.

En rapport avec le système nerveux et la forme physique :

  • Asthénie : fatigue chronique, sentiment d’épuisement, stations debout/assise pénibles voire insupportables ;
  • Douleurs dorsales et musculaires : douleurs lombaires, compression au niveau du diaphragme ;
  • Douleurs neuropathiques et nociceptives.

Le fait d’être atteint·e d’endométriose peut engendrer des conséquences comme :

  • des troubles cognitifs (langage, réflexion, concentration) souvent dus à la fatigue chronique ou aux médicaments ;
  • des problématiques psychologiques : anxiété généralisée, dépression, isolement, etc. ;
  • des troubles physiques qui peuvent empêcher de rester assis-e/debout trop longuement ;
  • et d'autres symptômes que nous avons vus précédemment.

Les formes d'endométriose

L’endométriose est aujourd’hui classée selon 3 formes :

  • On parle d’endométriose superficielle (ou péritonéale) lorsque les lésions restent en superficie, à la surface du péritoine. Elles peuvent prendre la forme de kystes (de quelques millimètres à quelques centimètres) en surface des tissus.
  • L’endométriose est ovarienne lorsqu’il y a un (ou plusieurs) kyste(s) endométriosique(s) à l’ovaire. On parle alors d’endométriome(s).
  • L’endométriose est profonde ou infiltrante lorsque les lésions s’étendent à plus de 5 millimètres de profondeur dans les tissus et plus précisément lorsque les lésions touchent la musculeuse des organes abdomino-pelviens. Le tissu endométrial devient fibreux, de type nodule et peut infiltrer l’organe. L’endométriose profonde touche principalement : la vessie, les uretères, le tube digestif (rectum, côlon sigmoïde, appendice), les ligaments utéro-sacrés, le cul-de-sac vaginal postérieur.
  • Une quatrième forme existe : le « frozen pelvis » ou pelvis/bassin gelé (de manière totale ou partielle) dont on parle moins puisqu’elle est propre à la classification du Dr Tamer Seckin (New York). C’est la forme la plus avancée d’endométriose. Elle se caractérise par des adhérences qui collent totalement ou partiellement les organes internes entre eux, en s’enroulant autour de ceux-ci, en formant des structures en forme de toile d’un organe à l’autre ou encore en se fixant à la muqueuse de l’abdomen. Cela peut entraîner de nombreuses douleurs puisque le bassin de la personne atteinte est figé ; les tissus mous devenant une fibrose très dense, les organes du pelvis sont collés entre eux, mêlant nerfs, ligaments et tissus musculaires. Il devient alors très difficile de croiser les jambes, de s’asseoir, d'aller à la selle normalement et d'avoir des rapports sexuels. D'importantes douleurs au niveau du trajet sciatique ou pudendal sont souvent décrites. Marie-Rose Galès dit d’ailleurs dans son livre que “c’est un peu comme si la Reine des Neiges avait abusé de son pouvoir dans votre pelvis” en gelant tout sur place.

Précisons qu'au-delà de ces 4 formes principales énoncées, il existe plein de types d'endométrioses, au niveau du diaphragme ou du cerveau par exemple.

Peut-on évaluer l'endométriose en fonction de son évolution ou de sa gravité ?

Les endométrioses sont très variées et seront différentes d’une personne à une autre.

Pour s’y retrouver, les médecins ont souvent classé les endométrioses selon des « stades ».
Cela fait référence à une classification de l’American Fertility Society publiée en 1978 (révisée en 1995 & 2017) pour évaluer une endométriose selon la localisation des lésions, leur taille et leur profondeur. Ce système de points permet de classer une endométriose sur une échelle de stades de 1 (minime) à 4 (sévère).

Cette échelle n’est plus vraiment utilisée aujourd’hui du fait de l’absence de corrélation entre l’étendue des lésions et les douleurs ressenties. Une personne avec une endométriose de stade 1 peut souffrir plus qu’une personne avec une endométriose de stade 4 par exemple. Cette absence de corrélation étant aujourd’hui démontrée, la notion de stades devient peu représentative. En outre, ce score est uniquement descriptif, sa valeur pronostique est faible et ne permet malheureusement pas de définir l’impact réel ou les douleurs que subissent les personnes atteintes. Il n’y a donc pas de règles à ce sujet. De plus, un même stade peut correspondre à des lésions très différentes.

D'où vient l'endométriose ? Cette question fait débat.

Si l'on tend à parler de l'endométriose comme étant une maladie multifactorielle, c'est parce que son étiologie (sa cause précise) reste jusqu'à présent inconnue et différentes hypothèses coexistent par ailleurs, afin d'expliquer sa genèse, son mécanisme de formation.

Une première hypothèse est celle du reflux menstruel, dite « théorie de l'implantation ».
Il s'agit de l’implantation de matériel utérin provenant de menstruations rétrogrades (le sang des règles pouvant remonter par les trompes et parvenir à la cavité abdominale, transportant avec lui des fragments d’endomètre).
Cependant, les clinicien-ne-s estiment que 90% des femmes présentent des saignements rétrogrades. Or, seuls 10% de ces femmes développent des lésions d’endométriose (cellules ectopiques : cellules se développant en dehors de leur place habituelle). L’explication est donc, au moins, insuffisante. Dès lors, les scientifiques parlent de facteurs de susceptibilité individuelle.

Il existe par ailleurs plusieurs hypothèses « métaplasiques ». La métaplasie désigne la transformation d'un tissu différencié en un autre tissu différencié.
L'une de ces hypothèses, exposée dès 1987 par le Dr David Redwine, stipule que la mülleriose serait la cause de l’endométriose, qui résulterait alors d'une anomalie dans l’organogenèse du fœtus. L’endométriose serait donc préexistante, présente à l’état embryonnaire, et cela bien avant les premières règles. Elle deviendrait symptomatique dès les premiers cycles. Le tissu embryonnaire présent dans le péritoine pourrait, en effet, former de l’endométriose. Cette théorie sera complétée par d’autres spécialistes au milieu des années 1980, notamment le Dr Ronald Elmer Batt et le Pr Pietro Signorile. Marie-Rose Galès, dans son ouvrage Endométriose : ce que les autres pays ont à nous apprendre paru en 2020, expose notamment cette théorie métaplasique et le retard dans la compréhension et l’utilisation de la bonne définition de l’endométriose en France.

Une dernière hypothèse est celle de la « dissémination » ou de la « métastase », qui suggère que, au moment des règles, les cellules endométriales sont aspirées par les vaisseaux et essaiment dans tout l'organisme via la circulation systémique.

Quels sont les facteurs de risques ? Pourquoi certaines personnes développent-elles de l'endométriose et d'autres non ?

Pour avancer dans ces recherches et dans la compréhension de la maladie, plusieurs projets épidémiologiques ont vu le jour en France sous l’impulsion de l’équipe de Marina Kvaskoff, épidémiologiste et chercheuse à l’INSERM, notamment le projet @compareendo qui étudie le vécu et l'évolution de la maladie auprès des personnes atteintes grâce à des questionnaires en ligne.

Concernant les facteurs de susceptibilité de l'endométriose, les scientifiques étudient aujourd'hui plusieurs pistes :

  • les facteurs environnementaux et les perturbateurs endocriniens (notamment les produits chimiques organochlorés tels que solvants, pesticides, insecticides et fongicides) ;
  • la piste génétique : on sait aujourd’hui qu’il n’y a pas un gène de l’endométriose, mais qu’il existe 14 variants génétiques caractéristiques de la pathologie ;
  • l’épigénétique : qui est la science des mécanismes moléculaires qui régulent l’expression d’un gène ;
  • la recherche cellulaire sur le stress oxydatif : phénomène d’oxydation chimique subi par l’organisme. Ce dysfonctionnement provoquerait une inflammation chronique locale et un échec d’élimination des cellules endométriales ectopiques ;
  • le dysfonctionnement du système immunitaire ;
  • la piste infectieuse.

Nous espérons que ces recherches permettront de faire avancer les choses et de mieux comprendre ou même soigner l'endométriose.

Sources
  • INSERM Fertilité, endométriose, l'INSERM fait le point sur les recherches, 30 avril 2019
  • Site internet de l'INSERM "Dossier : Endométriose"
  • Marie-Rose Galès, Endométriose : ce que les autres pays ont à nous apprendre
  • Prise en charge de l’endométriose par l’HAS
  • Frozen Pelvis in advanced endometriosis, Dr Tamer Seckin
  • Association Endomind : www.endomind.org/endometriose/
Rédaction : Silvia Badolato, Lindsay Bakala
Correction : Estelle B. et Monique B.

La névralgie pudendale

Lorsque l’endométriose devient neuropathique, plusieurs nerfs pelviens peuvent être atteints par l’inflammation. Parmi ceux-là, on retrouve le fameux nerf honteux, ou nerf pudendal.

Qu’est-ce que le nerf pudendal et quel est son rôle ?

Au sein du faisceau neuro­vasculaire pudendal, on trouve l'artère, la veine et le nerf pudendal : celui-ci est l’un des plus profonds et difficiles d’accès du schéma neuronal. Il prend sa source dans la moelle épinière, très exactement dans le plexus pudendal au niveau de la troisième racine sacrée du sacrum (S3). Des branches parentes émergeant des deuxième et quatrième racines le rejoignent pour se glisser immédia­tement sous le muscle piriforme.
Cette arborescence sort ensuite du bassin et passe près de l’épine sciatique pour confluer et ne former plus qu’un vers les bords supérieurs du ligament sacro-tubéreux et du muscle ischio-coccygien.

Il termine sa course dans un canal fibreux nommé canal d’Alcock (dédoublement de l’aponévrose du muscle obturateur). De là, il donnera naissance à trois nouvelles branches :

  • La première, nommée nerf rectal inférieur, traverse la graisse de la fosse ischio-anale pour atteindre la face latérale du canal anal. C’est un nerf mixte qui fournit sa sensi­bilité à la partie inférieure du canal anal (ligne pectinée), alimente au niveau moteur le sphincter anal externe et apporte une inner­vation sensorielle à la partie inférieure du vagin.
  • La seconde, le nerf périnéal, est la plus grosse des trois branches. À la sortie du canal d’Alcock, il se scinde en 2 arborescences : les nerfs périnéaux profonds (musculaires) et les superficiels (cutanés). La branche profonde irrigue les muscles du triangle urogénital (bulbo-spongieux, ischio-caverneux et muscle transverse périnéal superficiel), le sphincter urétral externe et les parties antérieures du sphincter anal externe. La branche super­ficielle donne ses sensations aux petites lèvres, au vestibule vaginal, à une petite partie du canal vaginal inférieur et à la face postérieure des grandes lèvres.
  • La troisième et dernière branche, le nerf dorsal du clitoris, est le seul pourvoyeur sensoriel des organes génitaux externes et est donc primordial dans le maintien des fonctions sexuelles : il irrigue le corps clitoridien et le gland.

Toute la complexité et la spécificité du nerf pudendal réside dans le fait qu’il a un triple rôle : sensoriel, moteur et végétatif. Sensoriel et moteur en innervant les structures somatiques comme les muscles, nous permettant une certaine maîtrise des muscles du plancher pelvien. A contrario, les structures végétatives fonctionnent en toile de fond (comme le cœur, les poumons par exemple). Grâce à cela, le nerf pudendal garantit le maintien d’un tonus des muscles du plancher pelvien, nous permettant, entre autres, de ne pas être incontinent·e·s.

C’est cette autonomie partielle qui peut poser problème lorsque la douleur frappe et perturbe le système nerveux sympathique. Les patient·e·s touché·e·s par la maladie expérimentent divers symptômes évolutifs : augmentation du rythme cardiaque, diminution de mobilité du gros intestin, vaso­constriction des vaisseaux sanguins, dilatation des pupilles, trans­piration excessive, augmentation de la pression sanguine, chair de poule, agitation certaine, anxiété… de quoi complexifier le diagnostic et favoriser l’errance médicale des patient·e·s.

Névralgie pudendale : caractéristiques et symptômes

La névralgie pudendale dans le cadre de l’endo­métriose se caractérise le plus générale­ment par une irritation des petits nerfs du pelvis due à l’irradiation de l’inflam­mation chronique. Ceux-ci ne savent plus comment réagir et envoient des signaux de douleur au cerveau alors qu’ils ne sont pas endommagés.

En cas d’évolution de la maladie, des lésions d’endo­métriose peuvent comprimer ou infiltrer les nerfs, dont le pudendal.

On retrouve alors deux types de lésions :

  • Les lésions dites « actives » (nodules, spots d’endo­métriose) qui réagissent au cycle hormonal, saignent et entre­tiennent l’inflam­mation, mais aussi compriment et peuvent pénétrer le nerf ;
  • Les lésions dites « passives » caractérisées par la fibrose, qui est un tissu cicatriciel issu d’anciennes lésions actives et qui n’est plus irrigué par le sang. Telle une toile d’araignée, la fibrose emprisonne les organes et les nerfs, les immobilise et les tire. Les nerfs ne peuvent plus remplir leur rôle et envoient un signal brouillé : la douleur.

Ces douleurs se traduisent de plusieurs façons en termes de ressenti. Tout d’abord les douleurs spontanées qui se manifestent générale­ment par une sensation de brûlure dans la zone rectale, périnéale, urétrale et/ou du clitoris et vagin, ainsi que dans les cuisses lors de fortes crises.
Les endométriosiques peuvent également vivre un Accès Douloureux Paroxystique (ADP), une crise de douleurs soudaine et aiguë qui peut durer plusieurs heures : sensation de corps étranger au niveau du rectum (balle de tennis), picotements/décharges électriques/sensation d’aiguilles et pincements, torsions ou tiraillements dans tout le périnée sont au programme. Ces crises surviennent généralement suite à une stimulation extérieure : frottements contre la peau, station assise/debout prolongée, trop forte mobilisation physique, changements soudains de température dans les extrêmes.

Un problème n’arrivant jamais seul, des dommages collatéraux surviennent dès le début de l’atteinte. On retrouve en premier lieu les problèmes urinaires et fécaux : sensation de brûlure à la miction, cystite inter­stitielle, dysurie (difficultés mictionnelles), petites fuites post-miction, douleurs à la défécation avec diarrhées et/ou constipations qui peuvent évoluer vers un Syndrome du Côlon Irritable.
Apparaissent aussi la plupart du temps des troubles sexuels : douleurs durant et/ou après les rapports/à la pénétration, absence de plaisir et libido en berne, hyper­sensibilité au niveau du clitoris et de la vulve.

Névralgie pudendale vs compression du nerf pudendal

Bien qu’ayant des causes différentes, les deux termes sont souvent confondus et établis comme synonymes.

La compression du nerf pudendal est définie par le blocage physio­logique du nerf nécessitant une inter­vention chirurgicale pour le libérer. Cette compression peut provoquer des névralgies pudendales mais a contrario, les névralgies pudendales ne peuvent pas créer de compression des nerfs. On sait aujourd’hui qu’il y a princi­palement trois causes à cette pathologie : une malformation de naissance (canal d’Alcock rétréci par exemple), une activité sportive répétée (cyclisme, équitation) qui aura pu créer de micros lésions et des atteintes suite à une opération dans la région pelvienne. Ainsi, dans le cadre de l’endo­métriose, de nombreux·ses chirurgien·ne·s font aujourd’hui marche arrière et ne conseillent l’opération qu’en dernière intention car au-delà de la possible multi­plication de fibrose suite à la cica­trisation (pouvant ainsi immobiliser les organes, tirer les nerfs et perturber leur signal), il y a toujours un risque de section de nerfs, surtout si l’opération est menée par un·e chirurgien·ne non formé·e en neuropelvéologie (spécialité en plein essor se concentrant sur les patho­logies du système nerveux pelvien).

Le terme « compression du nerf pudendal » ou « Pudendal Nerve Entrapment » est apparu dans la litté­rature scientifique européenne dès les années 80 avec le dévelop­pement des traitements de blocage de groupes de nerfs (« nerve blocks ») et des chirurgies de décompression.
L’un des symptômes principaux de la compression du nerf pudendal étant des douleurs lors de la station assise, comme pour les névralgies pudendales, les deux termes ont rapidement été confondus, ainsi que les traitements possibles. La chirurgie devint la réponse quasi systématique, à tort.
Les protocoles (nerve blocks, traitements et kinési­thérapie) se sont avérés inefficaces chez certain·e·s patient·e·s car se concentrant sur les conséquences de la douleur et non la cause réelle. Ajoutant à cela l’errance médicale qui a pour conséquence l’intégration de la douleur par le système nerveux, les médecins se retrouvaient avec des patient·e·s intraitables.

Le diagnostic évolua grâce aux découvertes autour du syndrome myofascial ainsi qu'à une approche pluri­disciplinaire des traitements comme appliquée aujourd’hui.
De même, les progrès autour des méthodes de détection employées ont mis en évidence qu’il est impossible de savoir si le/la patient·e souffre d’une compression du nerf pudendal avant d’opérer. C’est d’ailleurs le constat d’un soulagement de la douleur en post-opératoire qui permet d’affirmer qu’il y avait bien compression du nerf pudendal (selon les recherches du Professeur Roger Robert, du Docteur J.J. Labat et de leurs équipes).

Diagnostic, examens et prise en charge

Bien que la névralgie pudendale soit aujour­d’hui reconnue, sa découverte reste récente. La méconnais­sance du sujet par le corps médical et les symptômes, trop divers et variés, sont autant de facteurs qui ne permettent pas un diagnostic rapide. L’errance médicale qui en résulte peut entraîner de lourdes conséquences, aussi bien en termes de prise en charge (mauvais traitements pouvant aggraver la situation, évolution de la maladie jusqu’à en devenir irréversible) que sur le plan psycho­logique (incapacité à travailler/sortir menant à un isolement social, abandon de la vie sexuelle, dépression, suicide).

Les examens de première intention (radio, scanner, IRM) ne permettent pas de détecter les nerfs et leur état, mais ils sont cependant nécessaires pour éliminer d’autres patho­logies comme le syndrome de la queue de cheval. Dans le cadre de l’endo­métriose, une IRM pelvienne s'avère indispensable, mais d’autres IRM peuvent également être intéressantes (lombaire, sacro-iliaque).
Si exercé par un·e praticien·ne averti·e, un examen physique peut être effectué et apporter un éclairage nouveau sur le diagnostic, là où l’exploi­tation des imageries aurait pu se révéler infructueuse. Appelé « Signe de Tinel », l’acte consiste en de petits tapotements autour du nerf pour générer une sensation de pincements et d’aiguilles.
Une autre méthode, via un touché rectal ou vaginal, permet d'observer une douleur vive autour de l’épine ischiatique/le bord médial de l’ischion, région où le nerf pudendal passe. Des douleurs autour du muscle piriforme et du coccyx sont également assez courantes.

Ceci étant dit, le diagnostic de la névralgie pudendale se base aujourd’hui princi­palement sur l’historique médical du/de la patient·e, de son vécu et de ses symptômes. Pour cela, le corps médical peut s’appuyer sur les « critères de Nantes » : lorsqu’il constate que les quatre critères cliniques indis­pensables (douleurs dans le territoire du nerf pudendal, aggravées en position assise, ne réveillant pas la nuit et sans hypo­esthésie objective) sont réunis, on peut raisonna­blement penser à une névralgie pudendale.
Le questionnaire DN4, qui traite des douleurs neuropathiques en général, peut également s’avérer utile.

L’ENMG (électro­neuro­myogramme), qui est souvent mis en avant quand on parle d’atteintes aux nerfs, ne permet pas, en réalité, de faire la distinction entre une névralgie pudendale ou une compression du nerf. Il mesure l’efficacité du trajet nerveux sur l’ensemble des nerfs péri­phériques et permet ainsi de détecter les nerfs défaillants. Cependant, il a été démontré que cette pratique, en plus d’être désagréable voire douloureuse, peut présenter des faux positifs ou négatifs, surtout chez les personnes ayant accouché. De plus, la névralgie pudendale ou la compression du nerf pudendal sont des pathologies sensorielles : ce test mesure la rapidité des fibres motrices et non l’intensité de la douleur. Sa pres­cription est donc loin d’être systéma­tique et n’est que très peu pratiquée en France (seulement deux spécialistes).

Reste, enfin, la question complexe du traitement.

Quelles solutions ?

Une fois le diagnostic posé, un protocole est mis en place pour soulager le/la patient·e. « Soulager » est un mot important car en cas d’inflammation des nerfs suite à une endométriose, les nerfs concernés ne pourront pas être “guéris” si on ne traite pas la racine du problème : l’inflammation. De même, si, malheureusement, les nerfs sont abîmés, voire détruits par l’endométriose, ils seront difficiles voire impossibles à réparer. La névralgie pudendale est donc un problème largement sous-estimé et très sérieux dans ce contexte car pouvant conduire à des dommages irréversibles et handicapants à vie.

Dans la boîte à outils disponible pour lutter contre la névralgie pudendale, on retrouve un large panel de solutions, adaptables selon la source et la gravité de l’atteinte :

  • Un suivi avec un·e kinésithérapeute/physiothérapeute : sa place est centrale dans le traitement de la névralgie pudendale. Iel pratiquera une rééducation périnéale en relâchement (différente de la rééducation après accouchement ou incontinence), des techniques d’étirement du bassin. Le suivi quasi hebdomadaire avec un·e kiné permet également, au niveau psychologique, de nouer un lien avec un·e praticien·ne qui pourra expliquer ce qui se passe anatomiquement parlant. Le/la patient·e n’est alors plus seul·e face à ses douleurs et comprend un peu mieux son corps et son fonctionnement ;
  • L’ostéopathie va travailler les zones atteintes par la névralgie pudendale, ce qui diminuera l’intensité des crises sur le long terme. L’ostéopathe peut aussi traiter par voie interne mais attention : seuls les praticien·ne·s à double casquette kinésithérapeutes/ostéopathes ont le droit de pratiquer cette méthode ;
  • Si les atteintes neuropathiques trouvent leur origine dans des lésions actives d’endométriose, le traitement de première intention sera un traitement hormonal (pilule en continu, traitement macroprogestatif, ménopause artificielle par injection) ;
  • Pour casser le schéma douloureux, diminuer l’irritation et gagner en mobilité, des médicaments antiépileptiques comme la Prégabaline (Lyrica) ou la Gabapentine (Neurontin) pourront être prescrits : ils ont une action myorelaxante utile contre les contractures myofasciales périnéales. Le choix peut également se porter vers les antidépresseurs SNRI qui calment le système nerveux central (Cymbalta), ou les antidépresseurs tricycliques à base d’Amitriptyline (Laroxyl), Nortriptyline ou Désipramine.
    À noter que les antalgiques, les opioïdes et la morphine sont soit inefficaces, soit déconseillés car ils limitent l'absorption de l’acide aminé MNDA et, à terme, décuplent et pérennisent la douleur. S'ensuit un possible développement d’hyperalgésie/allodynie (douleur provoquée par un stimulus qui ne cause habituellement pas de douleur. Le frottement des vêtements est le symptôme qui revient le plus souvent chez les personnes atteintes). L’Acupan sera le seul antalgique assez puissant et non néfaste pouvant soulager la douleur, mais son efficacité varie d’une personne à une autre ;
  • L’infiltration des canaux pudendaux avec des corticoïdes à effets retardataires. Elles sont pratiquées sous scanner, échographie, électromyogramme, radioscopie ou simplement sous contrôle visuel. Les méthodes par scanner et échographie sont cependant les plus précises ;
  • L’injection de toxine botulique pour l’hypertonie musculaire : « Elle bloque la libération d'acétylcholine dans la jonction neuromusculaire, entraînant une dégénérescence des terminaisons nerveuses et donc une paralysie. » (Vidal). Pour tester sa possible efficacité, le/la patient·e va recevoir une injection de lidocaïne dans la zone touchée pour voir si effet positif il y a (la toxine botulique étant très chère). En cas de réduction significative de la douleur dans l’heure qui suit, l’injection de Botox est donc envisagée ;
  • La kétamine. Administrée en perfusion dans le cadre d’une hospitalisation, la kétamine anesthésie la douleur et casse le système de mémorisation de la douleur. Elle est efficace sur 3 à 4 mois mais ne peut pas être considérée comme un traitement à long terme car beaucoup d’effets indésirables peuvent survenir ;
  • La chirurgie par un·e spécialiste formé·e en neurologie/neuropelvéologie en cas de lésions d’endométriose ou de compression du nerf. Dans ce cas, la neurolyse par voie transglutéale après incision fessière, la neurolyse par cœlioscopie et la décompression par voie trans-ischio-rectale (TIR) après abord vaginal sont les trois techniques les plus fructueuses.

Dans les traitements de médecine « douce », on retrouve également :

  • Le TENS qui permet la neurostimulation et donc l’anesthésie des zones douloureuses ;
  • L’alimentation anti-inflammatoire et/ou anti-oxydante via un suivi avec un·e micro-nutritionniste ;
  • L'acupuncture ;
  • La relaxation, l’hypnose, la sophrologie, la méditation ou la thérapie comportementale pour apprendre à gérer la douleur chronique.

Rédaction : Laure G.
Relecture : Lindsay Bakala, Estelle B. et Monique B.

Notre contenu est à visée strictement informative et ne saurait remplacer vos relations avec un·e professionnel·le de santé.

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